Chapitre 1: La première fois que Karley entendit des voix (Karley)

J'avais deux ans, même pas encore. J'avais, plus exactement, un an et neuf mois, nous étions donc en septembre deux mille un. Le deux septembre précisément. J'étais chez moi, mes parents travaillaient; ma mère à la maison, mon père dans une usine. Et c'est là que, pour la première fois, j'ai entendu des voix. 

-Onze septembre deux mille un, pentagone, tours jumelles, attentats. 

Je répétai ces mots dans l'ordre. Ma mère, assise près de moi, se retourna. 

-Qu'est-ce que tu dis, Karley? demanda-t-elle. 

Je ne répondis pas. 

-Le onze septembre, réfléchit ma mère, c'est dans neuf jours. 

Encore une fois, je ne répondis pas. Pourquoi? Parce que je ne savais pas non plus ce que ça signifiait, ni d'où venaient les voix. Le soir même, ma mère dit à mon père:

-Karley a dit quelque chose de bizarre, tout à l'heure. 

-Ah oui? Quoi? demanda mon père. 

-Elle a dit les mots: onze septembre deux mille un, tours jumelles, attentats et pentagone. 

-Étrange, dit mon père en se retournant vers moi. 

J'étais sur le canapé et je faisais croire que je n'écoutai pas. À un an et neuf mois, je n'avais pas tout compris ce qu'ils disaient mais je me suis toujours rappelée des mots exacts. Après ce soir là, mes parents n'ont jamais reparlé de ma phrase étrange. Mais ils ont bien été obligés d'en reparler le mardi onze septembre deux mille un. 

Ce jour là, mes parents s'étaient réveillés à la même heure que d'habitude. Mon père et moi sommes allés à la boulangerie de la rue vers midi. Je ne me rappelle pas exactement, mais je crois que nous avons acheté du pain. C'est là que j'ai vu un calendrier septembre deux mille un. Tous les jours, jusqu'au dix, étaient barrés. Je compris plus tard que ça signifiait qu'on était le onze septembre. 

-Karley, qu'est-ce que tu regardes? demanda mon père. 

Je lui montrai le calendrier. 

-Nous sommes le onze, dit mon père. 

Il ne sembla pas se rappeler ce que j'avais dit neuf jours plus tôt. Il paya le pain et on sortit de la boulangerie. Une dame passa devant nous avec une fille de deux ans. Elle nous dit:

-Vous savez ce qu'il s'est passé ? 

-Non, répondit mon père, de quoi vous parlez ? 

-Regardez les informations, à la télé ! 

Elle s'en alla avec sa fille qui, un an plus tard, deviendra ma meilleure amie. Mon père fronça les sourcils. Moi, même si je n'avais pas tout compris, je sentais que cette femme avait peur. On rentra à la maison. Ma mère regardait avec beaucoup d'intérêt la télé. Elle se tourna vers nous. 

-Ce matin... Il y a eu un attentat qui a touché les tours jumelles, dit-elle en me regardant. 

Mon père se tourna vers moi et sembla me regarder de travers. 

Voilà c'était le chapitre 1! Dites moi ce que vous en pensez !